Peux-tu nous raconter ton parcours jusqu’à aujourd’hui ?
Je suis né et j’ai grandi à l’île Maurice, dans une famille de 5 personnes.
Comme nous n’étions pas très riches, j’ai commencé à travailler très jeune, à l’âge de 14 ans, afin de pouvoir aider ma famille financièrement.
Passionné de mécanique moto, je travaillais alors dans des petits garages autour de chez moi puis, de plus grosses concessions où j’ai pu développer davantage mon expertise.
Le 21 septembre 2004, j’ai eu un grave accident de moto.
Une camionnette, dont le conducteur était au téléphone, m’a coupé la route et m’a projeté au sol. Un autre véhicule m’a ensuite percuté et traîné sur 300 mètres. J’ai perdu mon casque et ma tête est passé sous une des roues.
Aujourd’hui, je suis paralysé du bras gauche à 99%, suite à un arrachement des nerfs.
En 2007, j’ai rencontré Lucinda, ma femme. On a eu une petite fille en 2012 qui a aujourd’hui 12 ans.
Ma fille, c’est ma force.
Après l’accident, j’ai trouvé un poste de mécanicien dans une concession à Paris, et par la suite, j’ai été embauché dans une entreprise, en tant que mécanicien vélo pendant 10 ans. Puis j’ai eu l’opportunité d’entrer à la CGT en tant que référent handicap pour l’accompagnement des personnes en situation de handicap en entreprise, poste que j’occupe actuellement.
Quelle est ta relation avec le sport ?
Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours aimé le sport.
Quand je vivais à l’île Maurice, je pratiquais déjà de nombreuses disciplines et plus particulièrement des sports de combat.
J’ai fait du kung-fu, du karaté, du Muay Thai pendant 6 ans. J’ai aussi pratiqué le kick-boxing pendant 7 ans et j’ai été qualifié pour un championnat, que je n’ai malheureusement pas pu faire à cause d’une blessure à la cheville.
Je faisais aussi pas mal de football.
Aujourd’hui, je pratique le Futsal handisport avec d’autres personnes présentant un handicap moteur.
Il y a une vraie dynamique et détermination au sein de l’équipe qui rendent chaque session vraiment géniale. On se soutient et on se motive ensemble, c’est très enrichissant.
Il y a 2 ans, l’équipe s’est même qualifiée pour la finale des championnats de France.
Peux-tu nous partager une anecdote particulièrement marquante liée à ta pratique sportive ?
Après l’accident, j’ai tenu à continuer la pratique sportive. C’est très important pour moi de rester dans le mouvement et de garder mon autonomie, je suis quelqu’un d’assez têtu.
Je me souviens d’un jour, quelque temps après ma convalescence, nous avons disputé un match de football avec mon frère et des amis. Au cours d’une action, je suis tombé. Mon frère a eu peur à ce moment-là. Il m’a demandé d’arrêter de jouer et d’aller m’asseoir car j’allais finir par me blesser.
Ce jour-là, je lui ai répondu : “ écoute, si je dois m’asseoir, autant ne plus rien faire de ma vie. Laissez-moi jouer parce que j’ai besoin d’être autonome et faire ce que j’aime. Même si je tombe, je me relèverai toujours.”
Comment le sport a-t-il changé ta vie, tant sur le plan physique que mental ?
Le sport m’a permis de ne pas baisser les bras. De toujours avancer, quels que soient les obstacles rencontrés.
Grâce au sport, j’ai acquis une véritable force mentale qui me permet aussi d’aider les autres. J’arrive à motiver d’autres personnes quand elles sont un peu déprimées ou qu’elles ont un coup de mou.
Ce n’est pas évident de garder le moral par moment. C’est toujours plus facile à dire, mais en pratique, garder la motivation et le positif demande une vraie force intérieure, c’est pour cela qu’il faut être bien entouré.
En tant que personne handicapée, quels obstacles as-tu rencontrés dans ta vie professionnelle ?
Lors d'un emploi précédent, j’ai eu un accident du travail parce que mon poste de travail n’était pas aménagé et adapté.
Cet événement m’a incité à agir pour un meilleur accompagnement des personnes en situation de handicap, que ce soit en entreprise ou dans leur pratique sportive. L'empathie et la compréhension sont des valeurs essentielles qui doivent être appliquées par tous.
C’est en écoutant et en soutenant les personnes en situation de handicap que nous favoriserons un monde plus inclusif et bienveillant pour tous.
Pour finir, quels sont tes projets pour la suite ?
En tant que référent handicap à la CGT, je travaille pour faire avancer les choses en termes de handicap en entreprise ou dans le sport. Je participe à différents salons, je rencontre beaucoup de monde pour essayer d’apporter des solutions aux problématiques rencontrées.
Récemment, j’ai créé des modules de formation pour aider les élus à mieux accompagner les personnes en situation de handicap dans leur entreprise comme dans leur vie privée.
Merci à Menvin pour ce partage d’expérience très enrichissant.
L'inclusion des personnes en situation de handicap dans les entreprises et le sport est un enjeu fondamental pour construire une société plus juste et égalitaire. Cela passe par l’accompagnement, l’écoute, la bienveillance, mais aussi l’aménagement des conditions de pratique et l’accès à du matériel adapté et de qualité.
Que ce soit dans le monde professionnel ou sur le terrain sportif, chaque individu a le droit de trouver sa place et d'exprimer pleinement son potentiel.
En favorisant l'accessibilité et en adaptant les environnements de travail et de loisirs, nous ouvrons la voie à une participation plus large et diversifiée.
Ecrit par linkNsportle 11/10/2024
