Encore trop peu médiatisé, l’athlétisme handisport compte parmi les disciplines les plus populaires, regroupant le plus grand nombre d’athlètes et d’épreuves.
Ce fut d’ailleurs l’une des 8 disciplines inscrites aux premiers Jeux Paralympiques de Rome en 1960.
Nous avons fait la rencontre de deux jeunes athlètes de l’équipe de France d’athlétisme handisport au palmarès impressionnant, figurant parmi les sportifs les plus prometteurs de leur génération.
Célia Terki, jeune athlète de 21 ans qui, après avoir été championne de France du 200m en 2020, vient de remporter le Grand Prix du 400m au meeting international élite de Dubaï, se plaçant ainsi 6e dans le classement mondial.
Kerrian Malcoste, champion de France d'athlétisme 2019 en 60m, 200m et saut en longueur, champion d'Europe jeunes du 100m Brest-Tours et champion de France 2020 en 60m et saut en longueur. Il termine sa saison 6e mondial au saut en longueur.
À quel âge avez-vous commencé l’athlétisme ?
Célia : J’ai commencé assez tardivement vers l’âge de 16 ans, après avoir essayé plusieurs disciplines. Quand on m’a diagnostiqué mon handicap, une dégénérescence maculaire, à 9 ans, j’ai tout de suite voulu mettre mon énergie dans le sport. J’ai essayé plusieurs formats, la natation, l’escalade, etc.. Puis un jour, mon prof de sport de l’époque m’a proposé de venir courir avec lui.
À l’époque, je ne pensais pas que je pouvais courir en étant mal voyante, je pensais que j’allais tomber, me faire mal. Finalement, en essayant, j’ai tout de suite adoré ce sport, ce sentiment de liberté et surtout, j’ai réalisé que je pouvais faire ça seule, malgré mon handicap visuel. Très vite, l’athlétisme s’est imposé comme une évidence pour moi.
Kerrian : Moi aussi, j’ai commencé l’athlétisme tardivement comme Célia, à l’âge de 14 ans. Avant ça, j’ai fait de la natation pendant 7 ans et puis, comme je faisais des tendinites à répétition, mon médecin m’a conseillé de mettre mes bras au repos.
J’ai dû chercher une alternative et par la suite, j’ai découvert l’athlétisme grâce à mon prof de sport au collège. J’ai alors fait 1 an en pratique niveau régional valide et à partir de 15 ans, j’ai commencé le haut niveau en athlétisme paralympique. C’était une bonne chose de commencer en niveau valide. Ça m’a obligé à avoir un entraînement très rigoureux et exigeant qui ensuite, m’a permis de vite monter en niveau.
Comment vous organisez-vous au quotidien entre les cours, les entraînements, les loisirs ?
Kerrian : On a un emploi du temps très chargé avec peu de loisirs et ce n’est pas toujours facile de réussir à tout caser dans une journée. On a une organisation très rigoureuse, chaque journée est planifiée à l’avance.
Célia : Tout dépend des journées mais le lundi par exemple, on se réveille à 5h30, le temps de se préparer et de sortir notre chien, puis à 6h30 on part s’entraîner à la salle de sport, de 8h à 10h.
Après on va en cours de 10h à 13h, on a la chance d’avoir notre école juste en face de la salle de sport.
Quand on finit les cours, on rentre manger et à 14h30, on part s’entraîner en athlé durant environ 2h, voire plus parfois. Ensuite, on a nos séances de kiné à 18h, le trajet nous prend 2h aller-retour ce qui nous fait rentrer vers 20h30, pour ensuite sortir le chien, manger et se reposer.
Combien d’heures vous entraînez-vous chaque semaine ?
Kerrian : On s’entraîne environ 20 h par semaine auxquelles on ajoute nos séances de kiné.
Célia : On fait aussi 2h d’entraînements de musculation 3 fois par semaine. Kerrian : Après, il y a aussi tous les “à-côté” des entraînements, on a toute notre communication, notre comptabilité à gérer, donc on peut dire qu’on a un vrai 35 h. (rire)
Et comment ça se passe pour vos entraînements ?
Celia : On est coachés depuis 1 an et demi par notre entraîneur Wilfried Krantz qui nous aide vraiment à nous surpasser, tout en adaptant les plans d’exercice à nos spécificités, nos pathologies et nos niveaux respectifs. Il nous aide aussi à trouver du matériel adapté pour nos séances d’entraînement.
Kerrian : On a aussi la chance d’avoir un groupe soudé qui nous aide à progresser. Depuis peu, on a d’ailleurs fondé notre association “la team Wil” pour avoir une identité pour le groupement d’entraînement en perspective des jeux.
Y a-t-il des difficultés particulières que vous rencontrez au quotidien ou durant vos entraînements ?
Kerrian : Comme tout le monde je pense, parfois il y a des journées où c’est plus compliqué. Quand il pleut par exemple, j’ai beaucoup de mal à me motiver mais, comme on pratique un sport d’extérieur, on a pas le choix, il faut trouver l’énergie malgré tout.
Célia : Moi, c’est plus par rapport à mon handicap. Comme je suis obligée de porter mes lunettes de soleil constamment, même quand il pleut ou qu’il ne fait pas beau, j’ai souvent droit à des réflexions parce que les gens ne comprennent pas forcément pourquoi.
Je ne leur en veux pas parcequ’ils ne savent pas forcément ce que j’ai, mais c’est vrai qu’à force, c’est fatiguant.
Qu’est-ce qui vous pousse à aller toujours plus loin ? Qu’est-ce qui vous motive ?
Kerrian : La perspective des jeux parce que c’est vraiment un objectif de vie.
Et puis, évidemment, le goût du challenge, l’envie de battre le chrono, et de repousser ses limites.
Célia : De mon côté, je vois vraiment ça comme un combat que je mène depuis l’âge de 9 ans.
Je n’ai toujours pas compris pourquoi j’ai eu cette maladie mais il faut que je vive avec, que je l’accepte et que je me batte chaque jour.
J’ai aussi envie de montrer aux plus jeunes que, même si on a des freins dans la vie, il faut toujours se battre ; quoi qu’il arrive, on finit toujours par réussir.
Il faut se battre jusqu’à ne plus en pouvoir et nos efforts finissent par payer, toujours.
Y a-t-il des freins dans la pratique sportive de haut niveau ?
Célia : Oui, principalement au niveau financier, c’est d’ailleurs pour cette raison que nous sommes en recherche active de sponsors.
Kerrian : Concrètement, les financements dépendent de notre classement dans le rang mondial. Lorsqu’on est classé dans le top 1, tout est pris en charge par la fédération.
Pour nous qui sommes classés dans le top 2, on a deux meetings financés chaque année, les autres sont à nos frais. Le problème, c’est qu’on doit participer à tous les meetings si on veut pouvoir améliorer notre classement mondial.
En plus des frais liés aux meetings (déplacements, frais d’hébergement, etc.) à cela s’ajoutent les frais de déplacements pour les compétitions nationales, le coût du matériel et des licences mais aussi tous nos déplacements dans le cadre de notre pratique sportive.
Merci à Célia et Kerrian pour leur partage d’expérience et leur énergie.
Pour suivre leurs actualités, rendez-vous sur leurs pages Instagram respectives, Célia Terki et Kerrian Malcoste.
Et pour en savoir plus sur l’athlétisme handisport, comment obtenir une licence ou intégrer un club, rendez-vous sur le site de la Fédération Française Handisport.
Ecrit par linkNsportle 09/12/2022
Terki
13/12/2022 à 21:20
Un grand merci à toi Sophie et à toute l’équipe Linknsport pour l’attention donnée à travers ce belle article.